Le travail souverain : Un désir de communisme
L’économiste Bernard Friot et Judith Bernard, enseignante, artiste et fondatrice du site https://www.hors-serie.net/, viennent de publier un livre de conversation autour de la pensée de dernier, sous un titre aussi dépourvu d’ambiguïté qu’audacieux en ces temps de domination néolibérale : Un désir de communisme.
« Alors que nous sommes écrasés par le rouleau compresseur du capitalisme néolibéral », écrit Judith Bernard en présentant l’ouvrage, Bernard Friot « sait faire apparaître le ‘déjà là’ des institutions communistes à notre disposition ; Plutôt que de se faire le défenseur des victimes qui peuplent les classes laborieuses il se met à l’école des vainqueurs qu’elles constituèrent ; au lieu de se lamenter devant la supposée toute puissance de la doxa capitaliste, il pointe les fautes stratégiques commises par la ‘gauche’, qui n’a perdu que dans l’exacte mesure où elle a adopté le discours et la vision du capital ».
Le « ‘déjà là’ des institutions communistes », ce sont les systèmes de retraite et d’assurance-maladie mis en place à la Libération, entre 1945 et 1947, à l’issue d’une lutte féroce avec les représentants du patronat. Imparfaits dès le départ du fait de l’opposition incessante des détenteurs du capital à laisser s’établir une complète auto-gestion des caisses par les travailleurs, ces systèmes n’en étaient (et n’en sont toujours) pas moins des éléments de souveraineté du travail sur lui-même, ce qui est la vraie définition du communisme. L’offensive féroce des gouvernements Hollande puis Macron contre ces systèmes ne fait que prolonger l’opposition du patronat dès l’après-guerre, qui s’est prolongée depuis en permanence avec pour effet la progressive dépossession du contrôle des caisses par les travailleurs.
Le troisième entretien du livre, intitulé « Bataille sur la retraite, un enjeu anthropologique », est spécialement abordé dans cette émission, alors que le gouvernement Castex s’apprête à tenter à nouveau de faire entériner une réforme des retraites extrêmement impopulaire. Bernard Friot, sur cette question comme sur les autres, refuse de penser et d’agir dans le cadre conceptuel et sur le terrain qui sont ceux de l’adversaire, car cela revient à entériner d’avance la défaite.
Pour lui, la retraite ne doit plus être pensée comme comme « revenu différé des cotisations » mais comme « poursuite du salaire » : c’est la condition pour « enfin stopper la baisse des pensions organisée depuis 40 ans ». « Chacun doit avoir à vie le salaire net de ses 6 meilleurs mois, toute autre situation va continuer à accompagner le recul du niveau des pensions » , ajoute-t-il. Il n’y a rien d’irréaliste, malgré l’idéologie relayée par la plupart des médias et enracinée dans beaucoup d’esprits, dans la proposition avancée par B. Friot d’instituer une retraite universelle à 50 ans avec maintien du salaire, ce dernier étant garanti pour tous et variant entre 1700 et 5000 euros par mois environ selon la pénibilité et les qualifications.
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